Rapport mensuel de l'Observatoire du football CIES

n°46 - Juin 2019

Analyse démographique de cinq grandes ligues féminines de football (2019)

Drs Raffaele Poli, Loïc Ravenel et Roger Besson

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1. Introduction

Pour la troisième année, l’Observatoire du football CIES a analysé la composition des effectifs des clubs participant à cinq ligues professionnelles féminines parmi les plus développées de la planète : quatre européennes (Allemagne, Suède, France et Angleterre), ainsi que la National Women’s Soccer League aux États-Unis.

L’analyse se focalise sur l’âge, l’origine et le statut international des joueuses. Les minutes de championnat disputées par chaque footballeuse sont prises en compte de manière à présenter des statistiques « sur le terrain ». Les données sur les principales origines expatriées font référence à toutes les joueuses alignées ou présentes au moins une fois sur le banc lors des matchs de championnat depuis le début de la saison jusqu’au 29 mai 2019.

2. Âge

L’âme moyen des joueuses sur le terrain a augmenté pour la troisième année consécutive. Il est passé de 25,1 ans en 2017 à 25,5 ans en 2019. Ce résultat traduit la tendance d’une proportion croissante d’équipes à faire confiance à des footballeuses expérimentées. Le développement économique des ligues analysées convainc un plus grand nombre de joueuses de rester plus longtemps au niveau professionnel. Les places pour les plus jeunes deviennent ainsi plus chères.

Figure 1 : âge moyen sur le terrain, par ligue

La Bundesliga allemande est le seul championnat où l’âge moyen sur le terrain a diminué lors des trois dernières années. Il s’agit désormais de la ligue alignant les plus jeunes joueuses parmi celles couvertes dans l’étude : 24,7 ans (-0,8 ans depuis 2017). À l’opposé on trouve la National Women’s Soccer League états-unienne : 27,5 ans (+1,3 ans depuis 2017). La plus forte augmentation a par contre été observée en WSL anglaise : +2,1 ans.

Parmi les dix équipes avec l’âge moyen sur le terrain le plus élevé, six font partie de la NWSL. La valeur la plus haute en absolu a été mesurée pour North Carolina Courage : 29,9 ans. Les multiples champions d’Europe de l’Olympique Lyonnais alignent aussi des compositions très expérimentées : 27,2 ans en moyenne.

Figure 2 : âge moyen des moins jeunes compositions

Les équipes de Bundesliga allemande sont surreprésentées parmi celles alignant les compositions les plus jeunes. Cinq d’entre elles figurent aux dix premières places et quatre sont aux quatre premiers rangs. Une seule équipe dans les ligues étudiées présente un âge moyen sur le terrain inférieur aux 23 ans : Borussia Mönchengladbach (22,6 ans).

Figure 3 : âge moyen des plus jeunes compositions

3. Expatriées

Cette partie se focalise sur la présence de footballeuses expatriées à la fois sur le terrain que dans les effectifs. La notion d’expatriée fait référence aux joueuses évoluant en dehors de l’association où elles ont commencé à pratiquer le football, qu’elles ont quitté suite au recrutement par un club étranger.

Le pourcentage de minutes disputées par les expatriées a augmenté pour la troisième année consécutive pour atteindre 32,4% (+4,4% par rapport à 2017). L’accroissement le plus notable a été enregistré en Angleterre (+7,5%), où de plus en plus de clubs investissent dans le football féminin en reproduisant les mêmes mécanismes déjà observés chez les hommes.

Figure 4 : % de minutes des expatriées, par ligue

Arsenal est de loin l’équipe où les expatriées disputent le plus grand pourcentage de minutes : 78,9%. C’est presque 20% de plus que pour les trois clubs classés entre la deuxième et la quatrième place : Bristol City, Wolfsburg et West Ham. Avec 50,2% des minutes jouées par des expatriées, l’Olympique Lyonnais est aussi présent dans le top 10.

Figure 5 : plus forts % de minutes des expatriées, par club

Le nombre total d’expatriées présentes dans les ligues couvertes augmente d’années en années : de 300 en 2017, on passe à 348 en 2018 et à 379 en 2019. L’internationalisation du marché du travail déjà observée au niveau masculin est aussi en marche chez les femmes. Au total, 53 associations ont des représentantes expatriées dans les ligues étudiées (+ 6 par rapport à 2017, +3 par rapport à 2018).

Le Canada est le pays avec le plus gros contingent de joueuses expatriées dans les championnats analysés : 28. Les Canadiennes sont particulièrement nombreuses aux  États-Unis au sein de la NSWL. Les Écossaises se dirigent très majoritairement vers l’Angleterre, alors que la moitié des Américaines expatriées se trouvent en Suède.

Figure 6 : principales origines des expatriées

4. Internationales

La proportion de minutes disputées par des footballeuses ayant déjà évolué dans une sélection nationale A a atteint pour la première fois 50% (+5,5% depuis 2017). La WSL anglaise devance désormais la NWSL américaine : 56,8% comparé à 56,0%. Ce résultat traduit l’importance des investissements consentis par les clubs d’Outre-Manche.

Figure 7 : % de minutes des internationales, par ligue

De nombreuses équipes évoluent avec une majorité de joueuses avec le statut d’internationales. Le pourcentage de jeu de ces dernières atteint 99,0% à Bayern Munich et 98,8% à Arsenal. Il est supérieur à 90% dans trois autre équipes : Wolfsburg, Manchester City, ainsi que chez les multiples champions d’Europe de l’Olympique Lyonnais (94,2%).

Figure 8 : plus forts % de minutes des internationales, par club

5. Conclusion

Les indicateurs passés en revue dans ce Rapport reflètent le développement économique ayant cours au sommet de la pyramide du football professionnel féminin. Dans ce contexte, l’âge des joueuses tend à augmenter, la mobilité internationale s’accroît et la concentration des meilleures footballeuses indépendamment de leur origine au sein d’un nombre limité de clubs et de ligues se poursuit.

Bien que réjouissante, l’évolution constatée montre l’importance de réfléchir à des mécanismes régulateurs à même de limiter les effets négatifs induits par les logiques de marché déjà observés au niveau masculin telles que, parmi d’autres aspects, la spéculation sur des jeunes joueuses, la concentration des ressources et le déséquilibre compétitif

 

 

Rapport mensuel n°46 - Juin 2019 - Analyse démographique de cinq grandes ligues féminines